Open Data

Open Data des décisions de justice : et à la fin, on y parvient ? (article rédigé le 7 juillet 2020)

Le décret n° 2020-797 du 29 juin 2020 relatif à la mise à la disposition du public des décisions des juridictions judiciaires et administratives tant attendu vient finalement d’être publié !

Rappelons que ce décret prévoit les modalités selon lesquelles les décisions de justice seront accessibles librement en open data, sous forme électronique et gratuite, sur un portail internet placé sous la responsabilité du garde des Sceaux (« open data »).

Faut-il s’en réjouir ? Bien sûr !

Faut-il sabler le champagne ? Oui, si l’on sait remettre le bouchon après sur la bouteille.

Car le diable se cache dans les détails, en l’occurrence les délais de mise en œuvre…

Sans détailler plus l’ensemble des dispositions prévues dans le décret, et notamment les modalités d’occultation des éléments d’identification des personnes physiques, parties ou tiers ou bien encore magistrats ou membres de greffe, rappelons quelques éléments de contexte :

  • Cette mise en open data des décisions de justice, longtemps un serpent de mer, est prévue par les articles 20 et 21 de la loi pour une République numérique du 7 octobre… 2016. Ce décret aura donc été attendu plus de trois ans et demi…
  • Il prévoit la mise à disposition des décisions des juridictions administratives « dans un délai de 2 mois à compter de leur date » pour les décisions rendues par les juridictions administratives, et  » un délai de six mois à compter de leur mise à disposition au greffe de la juridiction » pour les décisions des juridictions judiciaires.
  • Plus important, arrêté du ministre de la justice est encore attendu pour connaître la date à partir de laquelle les décisions de justice seront mises à disposition (pour chacun des ordres judiciaire et administratif et le cas échéant par niveau d’instance et par type de contentieux);
  • Dans cette attente, une note de la Secrétaire générale du ministère de la Justice et de la Cour de cassation, en date du 30 juin dernier, précise le calendrier envisagé : les premières décisions ayant vocation à être diffusées en open data sont les décisions de la Cour de cassation, en septembre 2021, et, dans un second temps, les décisions civiles, sociales et commerciales des cours d’appel, à l’échéance du premier semestre… 2022 
  • Et précise que la mise en œuvre de l’open data fera l’objet d’une évaluation « après la mise à disposition des décisions de la Cour de cassation et des cours d’appel, avant que les juridictions de première instance ne soient concernées ».

Bref, quand sera-t-on susceptible de prendre connaissance de décisions judiciaires de première instance (de très loin les plus nombreuses) sur un site internet de l’État ?

Probablement dans trois ans, au mieux, soit sept ans après la loi en prévoyant le principe. Et en supposant que l’évaluation prévue soit positive.

On peut espérer que, d’ici-là, non seulement les principes issus du RGPD seront scrupuleusement suivis comme le prévoit le décret, mais encore que la doctrine d’harmonisation des différentes occultations prévues par la loi sera établie de façon sereine et stable.

La démonstration est apportée : si la COVID-19 a forcé nombre d’entités à gagner quelques années en matière de transformation numérique et enfoncé quelques portes en matière de dématérialisation, cette maladie ne peut pas tout…

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