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Commerce électronique

Les mentions légales de sites internet sous les projecteurs : la vigilance est de mise !

Article co-rédigé en janvier 2020 avec Géraldine Péronne.

Les mentions légales d’un site internet, régulièrement incomplètes, confondues avec d’autres mentions d’information, reléguées sur une page lointaine ou parfois tout simplement introuvables, sont souvent négligées, car jugées d’importance mineure. 

Et pourtant, leur contenu minimal, prévu par la loi pour la confiance dans l’économie numérique depuis 2004, est de plus en plus fréquemment la source d’un contentieux judiciaire.  

1. Des mentions manquantes, c’est grave docteur ?

L’affaire du blog d’un homme politique connu (TGI Paris, 17ème ch., 10 juil. 2019) a ainsi remis sur le devant de la scène l’obligation de faire figurer sur son site des mentions légales exhaustives. En l’occurrence, la sanction s’explique par le fait que les mentions litigieuses ne comportaient pas le nom du directeur de publication. Même après correction, il manquait encore (!) le nom du co-directeur, obligatoire dans le cas où le premier bénéficie d’une immunité parlementaire. Certes la sanction a été symbolique (1 euro), mais elle s’accompagnait du remboursement des frais de justice pour la victime.

Cette décision est l’occasion de rappeler que les manquements relatifs aux mentions légales pouvaient donner lieu, d’après les textes, à une action empruntant :

  • Soit la voie civile avec une demande d’indemnisation pour le préjudice subi, comme c’était le cas ici ;
  • Soit la voie pénale, avec la condamnation à une amende pouvant aller jusqu’à 75 000 euros pour le dirigeant de la société, sur laquelle peut se greffer une action civile.

Ainsi, un jugement du 11 juillet 2014 du TGI de Paris a condamné deux personnes, identifiées comme éditeur du site notetonentreprise.com, pour n’avoir pas respecté l’article 6 III-1 de la LCEN. Pour cette absence des mentions légales obligatoires, ils ont été condamnés à payer 6 000 € d’amende, auxquels s’ajoutent notamment 1 500 € à verser à la partie civile, au titre des frais de justice.

2. Des mentions manquantes, le sur-accident ?

De manière plus fortuite, certaines décisions se sont fondées sur des mentions incomplètes ou inexistantes pour évoquer ou étayer d’autres types de violations, comme :

  • Un « comportement déloyal au regard des règles de la concurrence qui s’appliquent à toutes les sociétés », en cas d’absence totale de mentions (TGI Paris réf., 21 nov. 2017, Lafuma Mobilier), étant entendu que « le défaut de mentions légales d’un site pourrait même constituer un des critères permettant de qualifier un site internet marchand de site pirate » ;
  • Ou un parasitisme en raison de la copie mot pour mot, de mentions légales figurant sur le site d’une société concurrente, le fautif se voyant condamné à 2 500 euros de dommages et intérêt pour ce fait (CA Rennes, 11 septembre 2018, n°15/09630). 

Même dans l’affaire de l’homme politique condamné, l’action sur ce fondement n’avait pas été envisagée initialement : la victime voulait se plaindre à l’origine d’une diffamation, mais n’avait pu le faire en l’absence des mentions légales. Elle a donc agi sur ce fondement et obtenu une sanction pénale théoriquement plus forte que celle liée à la diffamation.

3. Les mentions légales, le reflet du sérieux d’une entreprise ?

A notre avis, ces dernières situations doivent interpeller :  si les mentions légales sont le reflet du sérieux d’une entreprise et souvent le critère permettant de faire le partage entre un site de confiance et un site frauduleux, des mentions mal rédigées peuvent également se retourner contre l’éditeur du site dans le cadre d’un conflit annexe, aggravant le risque originel.

Cet argument, à lui seul, devrait achever de convaincre les plus réticents de l’importance de disposer de mentions légales complètes, légalement irréprochables et adaptées à la situation : les exemples précédents montrent bien que la génération automatique ou la reprise de mentions tierces existantes n’est décidément pas une bonne idée.

4. Mais où les faire apparaître ?

Concluons sur un rappel de la forme que ces mentions devraient prendre : le TGI de Paris a indiqué le 21 novembre 2017 à l’occasion de la décision mentionnée ci-dessus que « pour respecter complètement les obligations légales, ces mentions doivent apparaître sous un onglet ou une rubrique indépendante et permettre aux utilisateurs ou aux tiers de pouvoir connaître le nom et l’adresse de l’entité responsable en cas de litiges sur le site et de pouvoir la contacter aisément. ».

Ces mentions sont nettement différentes, dans leur contenu, de « conditions générales d’utilisation du site », voire de « conditions générales de vente ». Mais ceci est une autre histoire…

Article co-écrit par :

  • Géraldine Péronne, Docteur en Droit, DPO de Nantes Métropole ;
  • et Me François Coupez, Avocat à la Cour, fondateur Level Up Legal.

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